A l'heure du projet du Nouveau Grand Paris (qui fut le Grand Paris
Express) promis pour entre 2025 et 2030, et alors que pleuvent les
injonctions à utiliser les transports en commun pour sauver la planète,
voici un petit extrait de ce que vit n'importe quel utilisateur régulier
du tant décrié RER B (qui va du Nord au Sud de la Région parisienne).
Trois semaines prises au hasard, sans qu'aucun événement particulier
(vacances, travaux, grèves) ne vienne les perturber.
Un train tous les quarts d'heure. Si tout va bien. Et 17 minutes de
trajet entre ma gare de départ (Drancy) et celle d'arrivée (Chatelet les
Halles). C'est la promesse. Très rarement tenue. Jugez par vous même.
Lundi 4 février
Soir : il est 20h15 lorsque j'arrive sur le quai de Chatelet - trois trains sont annoncés "retardés". Le premier qui va chez nous arrive à 20h40, soit 25 minutes après mon arrivée sur le "magnifique" quai de Chatelet Les Halles. Un endroit où tout le monde veut passer autant de temps si régulièrement (sic).
Mardi 5 et Mercredi 6
Matin : le train de 8h35 arrive à 8h43. Il roule très lentement à partir de La Plaine Stade de France. Et arrive à 9h07 à Chatelet, après 24 minutes de voyage (temps normal de voyage : 17 minutes), soit 41% de temps de trajet en plus.
Mardi soir et mercredi matin j'étais à Bruxelles, donc j'ai été tranquille.
Jeudi 7
RAS. Jour béni de la semaine.
Vendredi 8
Matin : le train de 8h35 arrive à 8h40. J'ai rendez-vous au bureau à 9h. J'y arrive à 9h10... Désormais habituel.
Soir : accident voyageur entre Chatelet et la Gare du Nord. "Un corps trouvé sur les voies" nous annonce t-on ! Aucun train ne passe pendant plusieurs heures. Ma femme et moi rentrons en Autolib. Le RER B meilleur complice de la voiture ?
-------- Semaine 2 --------
Lundi 11
Soir : à peine ma femme et moi étions descendus sur le quai du RER à Chatelet que ce dernier arrive. Il nous mènera à Drancy sans aucune difficulté. Il y a des jours comme ça aussi.
Mardi 12
Matin : étant en retard, je n'ai pas le temps de me rendre à pied à la gare. Je monte dans le bus 346, qui arrive à la gare une minute après que le RER soit parti. Comme très souvent. Résultat : 15 minutes d'attente avant le suivant... annoncé successivement par l'écran de la gare à 8h52, puis 8h49, puis 8h50, pour finir par arriver à 8h48, avec deux minutes d'avance sur son horaire théorique. Il n'attendra pas 8h50 pour partir, laissant sur le carreau les voyageurs arrivants à la gare juste à temps pour l'horaire officiel de leur train. Eux aussi attendront un quart d'heure. Imaginez le scandale que provoquerait un train grande ligne partant en avance !
Soir : le train pour Drancy est sur le quai de Gare du Nord lorsque j'y arrive. Je monte dedans. Deux minutes après être arrivé sans encombre à Drancy, le bus 346 m'embarque et me dépose à une rue de chez moi. Parfait. Et ça tombe bien, il fait un froid de gueux.
Mercredi 13
Il y a plein de places libres dans le train. Tout roule pour moi, donc. Mais en entrant dans Paris, le train ralentit et mettra plusieurs longues minutes à atteindre Gare du Nord. Dont il partira à 8h41. Il sera aux Halles à 45, soit un temps de trajet rallongé de 10%.
Soir : à 22h30, départ de Gare du Nord, aucun problème. Tout fonctionne et le train est quasi vide.
Jeudi 14
Ma femme, partie un peu avant 8h, vit tout cela de l'intérieur. Elle m'envoie un sms : "pas de RER à 8h05 (retard et donc suppression !?), prise du RER à 8h20 et à 9h, toujours pas à Gare du nord. Soi disant un problème de signalisation, mais trois RER sont passés avant..." Tiens, une troisième explication !
De mon coté, ayant été averti, je tente l'enchaînement bus 251, puis la ligne 5 du métro, puis enfin la 3. Je mets exactement une heure porte à porte !
Soir : arrivé à Gare du Nord, j'y vois l'annonce d'un "rail cassé à Denfert et d'un malaise voyageur à Aulnay qui perturbent le trafic". Ça ne change rien pour moi : mon train est annoncé dans 9 minutes. Bon, il arrivera pour de vrai 12 minutes plus tard. Pas très grave.
Vendredi 15
Soir : les écrans indiquent que "l'incident à Gentilly est terminé et que le trafic reprend progressivement". Si je n'avais pas lu, je n'aurais pas su, mon train arrivant six minutes après mon arrivée sur le quai.
Samedi 16
Midi : ma femme et moi nous rendons à l'Ile Saint Denis, pour visiter les anciens entrepôts Printemps, qui vont être détruits pour laisser place à un eco-quartier quasi piéton. Un peu de marche, il fait beau donc c'est plutôt agréable, puis nous prenons le bus 151 puis le tram T1. Simple et efficace. Même chemin, inversé, au retour.
-------- Semaine 3 --------
Lundi 18
Matin : Nouveau problème de "signalisation" sur le RER B. Il est 8h50, je dois être à mon bureau à 9h30, pour intervenir dans une réunion semestrielle de tous les cadres de l'entreprise. J'y serais finalement à 9h45. Heureusement, je ne devais pas introduire la réunion.
Soir : je rejoins ma femme sur le quai, à Chatelet Les Halles. Notre train arrive quelques minutes plus tard, et nous rentrons sans encombre.
Mardi 19
C'est aussi ce matin là qu'un de mes voisins me dévoile sa nouvelle stratégie pour éviter le RER B. Il prend sa voiture de Drancy à Aulnay sous Bois, pour y attraper un petit gris, train de banlieue vieillot qui dessert la capitale depuis Crepy en Valois (Oise). Ainsi, il passe par d'autres rails, moins encombrés (et, notamment, il ne dépend pas du fameux tunnel entre Gare du Nord et Chatelet les Halles, commun aux lignes B et D et qui pose tant de problèmes).
C'est aussi ce jour là que paraît l'article "Choisir son logement en
fonction des transports". Je prends les paris que dans quelques années,
on publiera des articles sur comment choisir son emploi pour qu'il soit
accessible depuis son logement. Ou qu'on aura mis en place des aides au
déménagement pour rapprocher logement et emploi.
Soir : je rentre en voiture de service. Un voisin s'est garé devant mon
bateau. Je ne peux donc rentrer la voiture dans mon garage.
Mercredi 20
Matin : je retourne à Paris avec la voiture de service vers midi, après
un déplacement outre banlieue. Une bonne vingtaine de minutes
d'embouteillages plus tard, j'atteins les portes de Paris. Il me faudra
1h15 pour faire tout le trajet (contre 47 minutes en RER, si tout va
bien). Le RER, c'est morose, la bagnole, c'est pas rose...
Soir : RER vers 22h30, depuis Denfert Rochereau. Le train à quai y
"stationne", sans qu'aucune annonce n'explique pourquoi. Il partira au
bout de quelques minutes. Finalement, j'arrive à Drancy dans un temps
quasi normal. Comme le trafic qui, quoi qu'il arrive, est presque
toujours annoncé comme "normal".
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Le lendemain matin, je me rends chez mon médecin, qui m'arrête pour quelques jours. J'en profite pour cesser également ce relevé. De toute façon, ces 16 jours détaillés montrent ce que nous vivons depuis que nous nous sommes installés dans la banlieue nord : sur 22 trajets, 7 se sont déroulés sans encombre ou annonce anxiogène. Soit un tiers. Tous les autres trajets ont connu des retards, des annulations ou des annonces montrant que le système ne marche pas (sans pour autant que cela ait de conséquence sur notre trajet).
Voilà tout ce qui fait que
dépendre du RER B est très fatiguant. Car même pour un trajet aussi
court que 17 minutes, le voyageur n'est jamais sûr qu'il pourra arriver à
bon port dans de bonnes conditions. Notamment, ce qui n'est pas arrivé pendant ces trois semaines, parce qu'il arrive qu'aucun train ne s'arrête pendant une heure dans les gares de Drancy et Blanc Mesnil. Sans parler de ceux qui en payent
les conséquences avec des retenues sur salaire ou autres...